Votre premier lavis
Le principe du lavis consiste à colorier un dessin avec des couleurs
diluées dans de l'eau. Cette façon de procéder est basée sur la
transparence et donc oblige le peintre à travailler en partant des
couches les plus claires pour terminer avec les teintes plus foncées.
Elle repose sur une analyse détaillée du dessin avant de commencer car
le repentir, s'il n'est pas totalement impossible, reste délicat.
N'oublions pas que le seul blanc mis à la disposition du peintre est
celui du papier. Réussir une aquarelle passe donc par une phase
d'apprentissage des techniques de lavis.
Pour vous entraîner à cet exercice périlleux nous
allons réaliser des aplats représentant le ciel d'une
future composition. Ainsi vos essais trouveront leur utilité par
la suite. Divisons donc une feuille (format 21x29,7 minimum
disposée dans le sens de la largeur) en deux parties
égales par un trait de crayon léger dessiné. La
partie haute sera consacrée au ciel. Suivez maintenant les
étapes et vous saurez pratiquer un lavis traditionnel.
Commencer par diluer votre peinture, en l'occurrence du bleu (celui de
votre choix) dans un godet. Préparez suffisamment de couleur
pour ne pas avoir à en refaire en cours de travail. Vous
n'obtiendriez jamais exactement la même teinte et surtout votre
dessin aurait le temps de sécher, ce qui occasionnerait des
cernes inesthétiques.
Chargez bien votre pinceau (taille moyenne) de couleur diluée et
tracez une première ligne le long de votre feuille.
La seconde bande sera tracée immédiatement en sens
inverse de la précédente en prenant bien soin que leur
jonction disparaisse naturellement avec le mouvement de va et vient.
Vous constaterez que la peinture à tendance à s'accumuler
vers le bas de votre bande. Ceci est d'autant plus visible que vous
aurez légèrement penché la feuille vers vous sur
un support en bois rigide.
Continuez ainsi rapidement afin d'obtenir un aplat de bonne
qualité. Aucune importance si vous repérez quelques
imperfections ici et là : c'est à la fois un
défaut et une qualité de l'aquarelle que de devoir une
part de sa réussite au hasard.
Pour les très grandes surfaces, on remplacera le pinceau par une éponge imbibée de couleur.
Laissez sécher ce premier essai et notez les maladresses
disgracieuses pour essayer de les corriger lors des essais suivants.
Vous constaterez aussi que la couleur une fois sèche a tendance
à ternir. Un élément qu'il faut prendre en compte
lors de la création du lavis.
Un paysage en camaïeu
S'il est une technique qui permet de s'imprégner totalement des
nuances d'un sujet, c'est bien le camaïeu. Basée sur
l'utilisation des différentes tonalités, du plus clair au
plus foncé, d'une même couleur, cette méthode est
idéale pour s'essayer à la maîtrise des contrastes
entre zones d'ombre et de lumière.
En utilisant une seule couleur on ne peut plus jouer sur la
complémentarité ou les effets de profondeur obtenus en
juxtaposant des couleurs chaudes et froides. Seuls le dessin et la
lumière vont vous permettre d'interpréter ce que vous
avez sous les yeux, qu'il s'agisse d'un paysage sur le vif ou d'un
travail d'après photo.
Je vous conseille vivement de jeter un oeil sur les dessins des grands
maîtres français du XVIIIe siècle. Ceux-ci
utilisaient volontiers le camaïeu pour mettre en valeur leur sujet.
Le petit paysage ci-dessus, bien que simple en apparence, est un bon
exercice d'interprétation d'une photo. Réalisé en
moins d'une heure, il est représentatif de ce que vous devez
pouvoir obtenir rapidement après quelques essais. Nous vous
proposons une chronologie à respecter pour votre travail afin de
mettre toutes les chances de votre côté.
1) Essayez de peindre sur un papier teinté, par exemple un gris
soutenu ou un sépia qui feront une bonne base pour votre futur
dessin. Vous pouvez aussi créer vous-même votre fond de
couleur avec un lavis uni ou un dégradé de votre choix.
Utilisez par exemple du sépia ou du brun mais pas du noir qui
est trop froid pour ce type de dessin, à moins de vouloir se
rapprocher du style bande dessinée. Dans ce dernier cas l'encre
noire sera parfaite pour le travail à la plume rehaussé
de gris divers. Pour vous donner une idée des couleurs
utilisées en camaïeu, voici trois exemples
différents de notre paysage. Celui du milieu est certainement le
plus classique puisqu'il s'agit du fameux sépia.
2) Pour une fois, oubliez votre crayon et essayer de poser à vue
les zones les plus foncées pour composer votre croquis à
la manière d'un négatif photographique.
3) C'est au tour des zones les plus claires d'être mises en place
sur votre papier. Normalement, vous devriez maintenant obtenir un
dessin efficace et contrasté.
4) Modelez doucement votre tableau en ajoutant d'autres
tonalités plus ou moins proches mais toujours en vous fondant
sur vos deux teintes de base (foncée et claire). N'essayez pas
de mettre trop de détails, c'est le type même de dessin
qui doit rester tout en nuances. C'est au spectateur de deviner et non
pas à vous de lui imposer un document trop chargé de
réalisme. Pensez votre paysage à travers une sorte de
brume qui estomperait les éléments du décor.
5) Les parties très ombrées, presque dans
l'obscurité, sont faites en dernier en ajoutant très peu
de noir à la couleur de votre camaïeu.
Voici pour finir la définition que le célèbre
Manuel Roret donne du camaïeu : "Genre de peinture d'une ou de
deux couleurs seulement. On appelle grisaille un camaïeu peint en
gris. Dans les camaïeux on observe la dégradation des
teintes, pour les choses éloignées, par l'affaiblissement
du clair et de l'obscur comme avec le crayon. On peut aussi mettre au
rang des camaïeux les peintures de clair obscur, qui sont de blanc
et noir et sans aucune couleur. Cette dernière sorte de peinture
est employée pour représenter des bas-reliefs de marbre
ou de pierre blanche."